Article du Prof. Agnès Pasquet

Yentl est un roman d’Isaac Bashevis Singer publié en 1962, mais c’est Barbara Streisand qui dans un film musical va populariser l’histoire de cette jeune fille. En Europe de l’est en 1904, Yentl vit dans un monde où les femmes n’ont pas accès à l’éducation, pour pouvoir se faire admettre dans une école religieuse réservée aux hommes, elle va se couper les cheveux, se déguiser en homme et changer de nom.

En 1991, c’est la cardiologue américaine Bernadine Haley, la première femme à diriger le National Institute of Health (NIH) qui utilise cette expression pour attirer l’attention sur la différence de prise en charge et de traitement qui existe entre les hommes et les femmes en cardiologie avec ce véritable « cri du cœur » : Faut-il être un homme pour être bien soigné ?

Les maladies cardiovasculaires restent la première cause de décès chez la femme, même si les femmes partagent de nombreux facteurs de risque avec les hommes, certains sont plus spécifiques aux femmes ou ont une traduction différente chez une femme.

Les pathologies cardiaques ont une expression différente chez la femme, prenons 2 exemples : l’insuffisance cardiaque et la maladie coronaire. L’insuffisance cardiaque chez la femme se présente plus souvent sous forme d’une insuffisance cardiaque à fonction préservée alors que chez les hommes il s‘agit le plus souvent d’insuffisance cardiaque a fonction altérée. L’atteinte coronaire est moins fréquente chez les femmes mais en cas de syndrome coronarien aigu l’absence de lésion coronaire ou des sténoses coronaires non occlusives se rencontrent plus fréquemment. L’atteinte de la microcirculation est beaucoup plus fréquente.

Les symptômes sont aussi différents, les infarctus chez l’homme se caractérisent très souvent par une douleur dans le bras gauche, une sensation de pression dans la poitrine avec parfois un serrement dans la gorge, par contre chez la femme, il s’agit souvent d‘une sensation de fatigue, d’inconfort, de dyspnée, une douleur dans la mâchoire. Ceci retarde le diagnostic, la prise en charge et contribue sans doute à expliquer une mortalité plus importante chez les femmes

La prise en charge est différente également, des registres américains montrent que les hommes ont 2,4 fois plus de chance d’être implanté d’un défibrillateur en prévention primaire.

Mais ce biais sexiste débute au niveau des études médicales et des essais cliniques où la population féminine est souvent sous-représentée, posant la question de la validité ou de l’efficacité de certains traitements chez la femme.

Enfin, la grossesse et la prise en charge des pathologies cardiovasculaires durant la grossesse suscite un intérêt grandissant pour la compréhension des pathologies cardiaques chez la femme