Pollution de l’air : Quels effets sur le risque de maladie cardiovasculaire ?

Article du Professeur Jean-François Argacha – Universitair Ziekenhuis Brussel, VUB

Une multitude de facteurs environnementaux agissent dans l’ombre des facteurs de risque traditionnels tels que le tabagisme, le diabète, le cholestérol et l’hypertension (Figure ci-dessous).

Vue d’ensemble du risque cardiovasculaire environnemental

Abréviations: POPs : Polycyclic organic pollutants, PAC : plastic associated chemical.
Certains facteurs agissent à un niveau individuel avec certains comportements pouvant influencer les niveaux d’exposition ; alors que d’autres facteurs agissent sur l’ensemble de la population. Les flèches pleines indiquent des interactions déjà étudiées alors que les flèches en pointillé indiquent une absence de données scientifiques sur l’effet cumulé de ces expositions.

Il est donc grand temps de considérer les maladies cardiovasculaires sous un prisme environnemental. L’objectif de cet article est de présenter la pollution de l’air qui est sans aucun doute le facteur environnemental influençant le plus le processus de vieillissement prématuré des artères (artériosclérose).

Pollution de l’air : mais de quoi parle-t-on exactement ?
Tout le monde a déjà observé la suie, fumée noire provenant de combustion incomplète, mais aussi les phénomènes de « smog » concentrant la pollution en un brouillard visible lors d’inversion thermique de l’atmosphère. Cependant, la pollution de l’air doit être surtout considérée comme une fumée invisible à laquelle nous sommes tous plus ou moins exposés selon notre lieu de vie, nos activités sociales et professionnelles. Comme toute fumée, la pollution est composée de matières gazeuses et de matières particulaires solides. Les principaux gaz sont les oxydes d’azote (NOx) incluant le dioxyde d’azote (NO2) et le monoxyde d’azote (NO), le monoxyde de carbone, le dioxyde de soufre, l’ozone ainsi que les composés organiques volatiles et semi volatiles. Le trafic routier est la principale source de NOx, et le NO2 est issu majoritairement des motorisations diesel. Les particules sont le plus souvent classées suivant leur taille. On distingue les particules dites « grossières » appelées PM 10 (diamètre <10µm, soit 5 fois plus petite que le diamètre d’un cheveu), les particules fines PM 2.5 (diamètre <2.5µm), et les particules ultrafines également appelées nanoparticules (diamètre <0.1µm). Au-delà de leur taille, les particules fines diffèrent surtout de manière qualitative, en fonction qu’elles soient d’origine minérale ou issues de processus de combustion. Ainsi, les particules issues du trafic routier ont un noyau formé d’atomes de carbone pur qui sont coiffés à leur surface par de nombreuses molécules toxiques (hydrocarbures aromatiques polycycliques, métaux dits de « transition » du fait de leur capacité à initier des réactions d’oxydation des protéines mais aussi des lipides et de l’ADN de notre organisme)

Diffusion de la pollution particulaire dans l’arbre bronchique et les alvéoles pulmonaires

Les particules ont différentes sources. Les plus petites d’entre elles qualifiées de particules fines (<2,5 µg/m de diamètre) ou ultrafine (<0,1 µg/m de diamètre) ont la capacité de diffuser très loin dans l’arbre respiratoire et peuvent atteindre le compartiment vasculaire où elles exerceront une toxicité participant à la promotion de certaines maladies cardiovasculaires. Un zoom permet d’observer la structure d’une particule fine. Il s’agit d’un noyau de carbone véhiculant à sa surface toute une série de molécules toxiques entre autre capables d’oxyder les protéines et les lipides de la membrane de nos cellules pulmonaires et vasculaires.

Dans les métropoles, le trafic routier peut représenter 30 à 40 % des émissions de particules et plus de 60% des émissions de dioxyde d’azote. De plus, 90 % des particules émises par le trafic routier sont dans la gamme des particules fines et ultrafines exerçant une toxicité particulière pour le système cardio-vasculaire du fait que, plus les particules sont fines, plus leur surface utile de transport de molécule toxique et leur capacité de diffusion dans le compartiment sanguin sont importantes.

Pollution de l’air : Quels effets sur ma santé cardio-vasculaire ?
Le dernier rapport de l’Agence Européenne de l’Environnement estime que la pollution de l’air est responsable de 400 000 morts prématurés par an dans l’EU-28, dont 112 000 par maladie coronarienne. Ces effets coronariens de la pollution de l’air présentent un double visage avec des effets à long terme, et des effets à court terme. Ainsi, il est fondamental de percevoir la pollution de l’air en tant que facteur de risque agissant sur le long terme, mais également en tant qu’évènement déclencheur de syndromes coronariens.
Sur le long terme, une étude de 2013 fusionnant les données de plusieurs autres essais (métanalyse) a démontré une augmentation moyenne de 13% de la mortalité cardio-vasculaire pour chaque augmentation de 10 µg/m3 de la concentration annuelle en PM2.5 enregistrée à l’adresse de domicile. La pollution particulaire n’est pas la seule incriminée puisqu’il a été observé une augmentation similaire de mortalité cardio-vasculaire associée au NO2. La mortalité par infarctus est la plus impactée avec de nombreuses études qui ont mis à l’avant plan une association entre l’exposition à la pollution de l’air et la survenue à long terme d’infarctus myocardique. Une vaste étude prospective européenne a ainsi démontré une augmentation de 12 et 13 % du risque d’infarctus pour chaque augmentation annuelle de respectivement 10 et 5 µg/m3 en PM10 et PM2. Cette étude a par ailleurs démontré que cette augmentation du risque était présente pour des concentrations en polluants situées en dessous des normes européennes actuelles de qualité de l’air. De nombreuses études ont également établi qu’une exposition sur plusieurs années à la pollution de l’air augmente le risque d’artériosclérose, et notamment le risque de calcification coronarienne5. Les polluants du trafic routier sont les principaux incriminés dans ce développement de l’artériosclérose. En effet, le risque d’avoir des coronaires calcifiées était augmenté de 63 % et 34 % chez les personnes habitant respectivement à moins de 50 m, et entre 50 et 100 mètres d’un axe routier majeur comparativement à celles habitant à plus de 200 m.
Sur le court terme, les pics de pollution sont également associées à une augmentation du risque d’infarctus myocardique. Une méta-analyse passant en revue les différents facteurs pouvant être à l’origine du déclenchement d’un processus d’infarctus myocardique, a démontré que l’exposition à la pollution de l’air et au trafic routier sont, à l’échelle de la population, les principaux facteurs déclenchant d’infarctus du myocarde8. Concernant plus spécifiquement l’augmentation du risque d’infarctus en Belgique, une de nos études a prouvé que chaque augmentation de 10 µg/m3 en PM2.5 était associée dans les 24h suivantes, à une augmentation du risque de 2,8 % de survenue d’un infarctus myocardique. De manière encore plus marquée qu’avec la pollution particulaire, une augmentation en NO2 de 10 µg/m3 était quant à elle associée à une augmentation du risque d’infarctus de 5,1 %.
Les effets cardiovasculaires de la pollution de l’air ne peuvent pas être réduits aux effets coronariens même si ceux-ci prennent le devant de la scène. La pollution de l’air augmente également le risque de thrombose cérébrale (AVC), d’insuffisance cardiaque et de certaines arythmies.

Pollution de l’air : Comment de si petites particules arrivent à affecter ma santé cardiovasculaire ?
De nombreuses études ont été réalisées chez l’homme et chez l’animal pour comprendre les mécanismes physiopathologiques des effets de la pollution de l’air. L’exposition aux polluants de l’air engendre principalement une réaction de défense de l’organisme via le système nerveux végétatif et le système inflammatoire. Quand les particules atteignent le compartiment vasculaire des alvéoles pulmonaires où se font les échanges gazeux d’oxygène et de dioxyde de carbone, elles agressent la paroi des vaisseaux par leur capacité d’oxydation. Cette réaction oxydative va réduire la disponibilité d’une substance clef de la régulation du fonctionnement de nos vaisseaux, l’oxyde nitrique (NO), mais aussi engendrer une réponse inflammatoire dans nos vaisseaux. Les répercussions fonctionnelles à cette cascade oxydativo-inflammatoire survenant dans la paroi vasculaire sont nombreuses : la régulation du flux sanguin qui doit répondre aux besoins en oxygène du muscle cardiaque est altérée; l’inflammation de la paroi vasculaire la rend plus perméable au cholestérol qui va pouvoir plus facilement s’y déposer et former une plaque rétrécissant le passage du sang (sténose); des molécules sont synthétisées en excès facilitant l’adhésion des plaquettes sanguines et la formation de caillot pouvant potentiellement totalement obstruer le passage du sang et engendrer un infarctus ou un AVC.

Pollution de l’air : Y-a-t ’il des inconnues auxquelles il faut rester vigilant ?
La cardiologie environnementale est une discipline naissante et la vision des effets de la pollution de l’air est encore partielle. La première donnée à prendre en considération est que, même en 2023, nous ignorons encore comment les polluants interagissent entre eux. Ainsi, lors d’une visite médicale, le médecin peut aisément appréhender quels seront les effets d’une exposition conjointe au tabagisme, au diabète et à l’hypertension. Ces effets sur le risque cardiovasculaire sont d’ailleurs multiplicatifs et non additifs. En qui concerne l’effet cumulé d’une exposition aux particules fines, aux bruits du trafic aérien ou automobile, aux polluants alimentaires… nous l’ignorons toujours à l’heure actuelle. La deuxième donnée à prendre en considération est que les effets sur la santé sont décrits en fonction d’une exposition exprimée en µg/m3, autrement dit d’une concentration. Ainsi tous les effets décrits jusqu’à présent se basent uniquement sur des effets quantitatifs et n’intègrent pas de données qualitatives de l’exposition, or la toxicité des particules varie selon leur source. Les recherches futures doivent donc aller vers des mesures d’exposition individuelle caractérisant la capacité oxydante des particules inhalées.

Pollution de l’air : Comment se prémunir de ces effets toxiques sur ma santé cardiovasculaire ?
Malheureusement il n’y a pas de stratégie individuelle réaliste, tel que le port de masque FFP2, permettant de se protéger de l’exposition aux particules fines. De même, il n’est pas prouvé que des suppléments alimentaires « anti-oxydants » sont efficaces en prévention, et plus particulièrement dans la prévention des effets cardiovasculaires de la pollution. Le mal doit donc être corrigé à sa source par une approche collective visant à réduire les émissions. Les normes de l’OMS de la qualité de l’air viennent récemment d’être adaptées en ce sens et fixent des objectifs qui sont encore loin d’être atteints en Belgique. Cependant l’espoir est grand que le contrôle des émissions de CO2 visant à limiter le réchauffement climatique va également s’accompagner dans le même temps d’une réduction des émissions de particules fines. Les médecins et les patients souffrant de problèmes cardiovasculaires trouveront donc un intérêt certain à défendre ces mesures climatiques.

Témoin d’un arrêt cardiaque ?

COMMENT LE RECONNAITRE ?

La victime perd connaissance, ne réagit pas à une forte voix et ne respire pas ou de manière très irrégulière.

COMMENT REAGIR ?

Appelez le 112
et donner l’adresse précise

Commencez le massage cardiaque :
a. Placez les mains au centre du thorax
b. Comprimez la poitrine 30x au rythme de «Staying Alive» (min 100/minute)

Défibrillez à l’aide d’un DEA :
allumez-le et suivez ses instructions

Quand les services d’urgence sont arrivés, soyez fier, vos mains ont sauvé une vie…Devenez un Chevalier du Cœur !

1 minute gagnée, c’est 10% de chance de survie en plus !
Nous avons tous le pouvoir de sauver des vies !

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